NAISSANCE du PROJET


Des enfants maltraités à « La dispute » de Marivaux
 
"En 2010, je me retrouvais dans le Morvan suite à la thèse d’Emmanuelle Jouët, chercheuse en sciences sociales, pour travailler sur une terrible histoire de maltraitance sur des mineurs qui dura près de 10 ans et qui aboutit en 1911 à un procès où des adultes étaient pour la première fois condamnés pour maltraitance à Avallon.

La pièce s’intitulait « Les enfants des Vermiraux » et nous avons pu jouer la deuxième partie de la pièce dans le tribunal d’Avallon où un siècle auparavant avait eu lieu ce procès effacé de la mémoire collective et qui ressurgissait grâce à cette création théâtrale.    
 
 
Je découvrais à travers cette thèse, qui devint un récit théâtral, d’abominables abus d’adultes sur les enfants des Vermiraux à Quarré les Tombes. Ont participé à cette création des jeunes d’un collège, d’une école amateur d’Avallon, 5 détenus lors d’un premier atelier mixte créé dans la prison de Joux la Ville, une dizaine de jeunes du foyer la Maison d’Auxerre et d’un centre éducatif sous le coup de la justice. Nous avons joué 7 fois le spectacle à Avallon, Quarré les Tombes et dans le centre de détention de Joux la Ville.

Par la suite, le foyer la Maison comme le centre éducatif d’Auxerre ont souhaité sur 2012-2013 renouveler leur collaboration et ont entraîné avec eux d’autres foyers sur Auxerre, Coulanges… et le centre éducatif renforcé de Gurgy avec lesquels nous avons créé des courts métrages et des créations scéniques « De la scène à l’image et les 7 péchés capitaux » Une centaine de jeunes ont participé à ce projet. La presse comme sur « les enfants des Vermiraux » en a fait écho de belle manière. 
 
 
En 2014, l’engouement des directeurs et des éducateurs de foyers, de centres éducatifs, instituts thérapeutiques et bien entendu des acteurs en herbe nous amène donc à nous lancer un nouveau défi artistique sur 2014 : la création d’une œuvre théâtrale de grande envergure : « La dispute » de Marivaux.

En effet ces jeunes suivent depuis plus d’un an des ateliers d’art dramatique, ils ont pour la première fois dans leur grande majorité découvert le théâtre et le cinéma, ils se sont transformés au fur et à mesure des ateliers. 
Ils ont découvert une culture, une nouvelle manière de s’exprimer, de prendre la parole pour mettre de côté la violence qui les accompagne trop souvent, ils sont devenus des acteurs à part entière et ont du talent.

Ils ont retrouvé dans la création scénique la confiance en eux, un certain calme, le travail de mémorisation, l’immobilité, le silence… qui leur ont permis de surmonter leurs difficultés, un lieu qui ne les montrait pas du doigt dans leurs échecs mais qui leur redonnait le goût du travail personnel et en groupe. Ils se sont épanouis, ils se sont aimés.
Nous sommes donc, dans notre démarche artistique, tenus de continuer avec eux ce chemin de création, pour les porter plus loin, et leur lancer ce défi, jouer du Marivaux, une langue fine et subtile qui parle au travers de « La dispute » de l’infidélité de l’homme et de la femme par la voix de jeunes adolescents.

Aujourd’hui ces jeunes acteurs sont mûrs pour comprendre le langage de Marivaux, s’en emparer et l’interpréter, mais pour cela il a fallu plus d’un an de travail en commun et le partage d’une culture théâtrale qu’ils ignoraient alors.
Ce sera aussi l’occasion de mettre en avant le cas de ces jeunes souvent ignorés et parfois délaissés par la société pour ce 25ème anniversaire de la Convention Internationale des droits de l’enfant.
 
En France, ce sont plus de 200 000 mineurs qui vivent dans des foyers, centres éducatifs ou instituts thérapeutiques. Leur droit à la culture est un droit majeur, car il leur permet d’avancer, d’exister, de se défendre, de progresser aussi dans leurs études, de se découvrir des talents et pour certains, dans leur futur, peut-être un choix de vie. 

Nous souhaitons les confronter à un vrai public divers et populaire, les faire jouer dans de belles salles, leur offrir le confort de loges et d’équipements techniques de qualité, d’une équipe de professionnels confirmée de la mise en scène, en passant par les éclairages, les décors, les costumes, les maquillages…
C’est pour cette raison que nous comptons créer « La dispute » dans un premier temps en Bourgogne, Gurgy, Avallon, Nevers… et ensuite dans un théâtre à Paris (en cours).
Nous profiterons aussi pour faire quelques rencontres éducatives sur le théâtre classique et Marivaux avec le savoir d’un conseiller artistique passionné par ce type de rencontres.
Des artistes issus des Tréteaux de France seront associés à ce projet pour la partie chant, chorégraphie, concentration... (en cours)

La pièce sera traitée sur un plan télévisuel et théâtral dans une mise en scène qui permettra à chaque jeune d’avoir sa place en créant des scènes intermédiaires, les acteurs étant plus nombreux que les personnages de la pièce de Marivaux.
 
Le mois de juillet 2014 sera consacré à une résidence-théâtre où tous les jeunes acteurs se retrouveront dans un même lieu durant 2 semaines pour affiner le travail de répétitions en vue des représentations à l’automne 2014 (voir calendrier).
 
Un documentaire de 26’ est en pourparler avec France 3 Bourgogne qui s’engage à suivre ce projet au plus près tout au long de l’année 2014."
                                                                                    
 
Vincent THOMAS, Directeur Général du réseau éducatif ALEFPA dans l’Yonne, (CER (centre éducatif renforcé) et  la MECS (maison d’enfants à caractère social) de Gurgy) :
Le projet 2012/2013 se distingue à mes yeux dans trois dimensions fort positives.
La première est celle de ce qu’il a apporté à nos adolescents, cette capacité à se voir autrement et de là à commencer à reconstruire une nouvelle image d’eux-mêmes.
La seconde est celle du partenariat, du travail en réseau, travail qui aura permis de faire connaissance mais aussi de trouver reconnaissance tant avec les partenaires institutionnels qu’avec les représentants de la société civile.
Enfin, la troisième est celle de l’aboutissement, le fait de terminer, de mener au bout ce que l’on a entamé, conclusion qui n’est pas courante pour les populations que nous accompagnons. Que ces projets vivent longtemps !
 
Sophie SENELLART PACCOT, Directeur de l’ITEP (institut thérapeutique éducatif et pédagogique) de Saint Georges sur Baulches:
Le portrait des jeunes inscrit dans le projet de la Cie du Labyrinthe permet de comprendre comment peut s’articuler l’art dans son accompagnement, il devient essentiel, il va permettre au jeune de se représenter le monde différemment, de ne plus être dans l’acte immédiat, dans les affects et les émotions puisqu’il peut les jouer, jouer pour du faux afin de se protéger de ce qu’il ne peut maîtriser. Le théâtre donne un cadre limité, et ce jeune,  plus qu’un autre, a besoin de limites, mais de celles qui ne  frustrent pas. A l’intérieur de ce cadre c’est lui seul qui nous intéresse, ce n’est pas de faire comme le veut l’enseignant pour l’amener à réussir, comme l’éducateur voudrait qu'il se tienne ou comme ses parents voudraient qu'il soit. C’est pour lui-même qu’il participe. Il y a une plus-value énorme pour le jeune et pour les professionnels puisque la rencontre a permis de sortir de certains automatismes. Il n’y a rien de posé dans un accompagnement social. L’artiste fait avec les interrogations du monde et sait bien le faire. Accompagné par l’artiste dans un tel projet, jeunes et professionnels sortons grandis de nos questionnements.
 
 
Aline DUVAL, Directeur de Site, FDE/MECS de Coulanges sur Yonne:
Cette aventure a été passionnante pour les jeunes et pour nous tous. J’espère qu'elle se poursuivra encore.
 
Mario IURIO, éducateur à la Mecs de Coulanges sur Yonne:
De l'estime de soi, voilà comment je qualifierais ces moments passés avec Serge Sándor et les adolescentes de La Maison d'enfants de Coulanges sur Yonne. Car au-delà du plaisir des moments d'expressions théâtrales, je retiens aussi l'utilité manifeste d'avoir permis à des enfants parfois à l'expression bâillonnée d'être reconnus dans leur création. L'objectif se réalisait en fonction de ce que les enfants donnaient et leur expression n'était sujette à aucune notation. Bien entendu, je fais référence à leur vie quotidienne où sont valorisées essentiellement  les performances scolaires et l'adaptation aux désidératas des adultes. Je sais maintenant qu'il faut savoir contourner les obstacles du système « performatif »  afin de permettre à ces enfants de "l'échec" d'avoir envie de s'épanouir et par là même de percevoir le chemin d'un avenir possible. Merci aux circonstances  d'avoir conduit Serge à la Maison d'enfants de Coulanges sur Yonne et les "Gosses "et moi-même  nous attendons la suite des épisodes...
 
Jean-Michel CARPENTIER,  Educateur technique spécialisé au CER de Gurgy:
J'ai été très content de participer avec mes jeunes au projet culturel des 7 péchés capitaux.
Avec l'aide professionnelle et artistique de Fanny Garrigue, décoratrice de la Cie du Labyrinthe, les jeunes, présentant une très faible motivation et peu d'enthousiasme, à l'origine de cette activité, ont quand même pensé, réfléchi et réalisé les 7 modules métalliques, donnant naissance à un totem coloré de trois mètres de hauteur. Ceci nous montre, que ces jeunes en très grandes difficultés, sont capables, en les aidant et en les soutenant, de réaliser de très beaux projets.
 
Sébastien CHARTIER, éducateur à l’ITEP de Saint Georges sur Baulches:
Une expérience inoubliable pour ces jeunes devenus, pour un temps, des artistes et dans tous les cas une belle aventure humaine pour nous tous. 
 
Jean-Luc LIVERNEAUX, maire-adjoint de Gurgy:
Plus qu'une aventure pour ces jeunes, un souvenir éternel de cette rencontre, à continuer sans aucune modération, chapeau les jeunes !
 
 
 
 
 

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